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Présentation de la collection

Le musée de l’Armée conserve dans ses collections plus de 800 dessins et estampes de Jean Delpech ainsi que deux peintures sur la Seconde Guerre mondiale. L’une des particularités de ce fonds est son entrée en deux temps dans les collections. En 1972, l’artiste fait lui-même don au Musée d’un ensemble d’œuvres sur papier, complété par une acquisition auprès de sa famille en 2019.

Histoire d’une collection

Le don de 1972

L’entrée des œuvres de Jean Delpech au musée de l’Armée en 1972 est à mettre en lien direct avec l’histoire du Musée et la création de son parcours permanent sur la Seconde Guerre mondiale. À cette époque, outre la collecte de nombreux objets et équipements militaires, le colonel de Buttet, alors conservateur au musée de l’Armée, a également entrepris de recueillir des représentations du conflits auprès d’artistes ayant vécu cette guerre afin d’évoquer plus largement le conflit, et notamment les conséquences sur les populations civiles. 

Le don de Jean Delpech est particulièrement intéressant car ce dernier a sélectionné lui-même, en collaboration avec le colonel de Buttet, un corpus de ses œuvres intégrant tous les aspects de sa production liée à la Seconde Guerre mondiale ainsi que des œuvres aux statuts divers, permettant de comprendre la démarche créative de l’artiste.

L’acquisition de 2019

En 2019, le musée de l’Armée a pu compléter ce fonds par l’achat auprès de la famille de l’artiste d’autres dessins et estampes couvrant la période 1938-1949. Il s’agit des œuvres en possession de l’épouse de l’artiste, Micheline Delpech (1921-2021). Cette seconde acquisition enrichit le don de 1972 avec notamment plusieurs dessins à l’encre de grand format datant du service militaire ainsi que de très belles compositions complexes gravées et dessinées datées de 1942 et 1943, représentant la vie sous l’Occupation. Elle complète également le reportage effectué par Delpech en 1945 avec plusieurs croquis et dessins préparatoires permettant de suivre au plus près son parcours en Allemagne et d’affiner la chronologie des feuilles, uniquement datées de l’année 1945.

Patrouille d’éclaireurs-skieurs, 15e bataillon de chasseurs alpins, 1938, inv. 20929-332.

Patrouille d’éclaireurs-skieurs, 15e bataillon de chasseurs alpins, 1938, inv. 20929-332
Photo © Paris - Musée de l'Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Emilie Cambier © ADAGP, Paris

« L’instruction commencée en salle se continue en plein air, par tous les temps, sur le terrain de manœuvre, par section, par compagnie, puis par entier bataillon. Et puis dans la nature, en file indienne, avec un paquetage de plus en plus lourd, en plaine, ensuite en montagne, hors routes, par des sentiers dans les zones forestières ou herbues, puis sur les éboulis instables des cols à 2000 m. Ensuite nous attaquons des escarpements qui nous semblent vertigineux. » 

Jean Delpech, Journal de guerre

Parcours d’un artiste pendant la Seconde Guerre mondiale

Les œuvres de Jean Delpech retracent son parcours à partir de la fin des années 1930 et pendant la Seconde Guerre mondiale. Delpech se définissait comme un « ethnographe ». Depuis son service militaire au 15e bataillon de chasseurs alpins, où il est mobilisé en septembre 1939, jusqu’à son séjour en Allemagne en 1945, en tant que correspondant de guerre auprès de la 1re armée, l’œuvre de Delpech se veut atypique et restitue la vision subjective d’un artiste de grand talent face à une époque ambiguë et troublée. 

« La photo est un croquis instantané, utile mais insuffisant. Véracité garantie, avec son corollaire, la platitude. Les dessinateurs donnent une image plus synthétique, plus composée, plus riche parce que transposée, imaginée quelquefois, mais finalement plus exacte. Chacun peut s’exprimer à sa manière : sarcasme, synthèse épique, précision des détails. »

Jean Delpech, Journal de guerre

Un artiste au travail

L’œuvre de guerre de Jean Delpech a forgé son style. Par son originalité, son sens du cadrage, son souci du détail et son usage de la couleur, elle témoigne d’une sensibilité attentive au monde qui l’entoure jusque dans les moindres détails. Dès le début du conflit, la ligne et le trait sont bien en place, les couleurs saturées donnant un aspect naïf assumé. Le travail de Jean Delpech est enraciné dans le réel tout en exaltant l’insolite pour se situer entre fantaisie, fantastique et monde visionnaire.

Le fonds Delpech reflète la pluralité des intentions de l’artiste et se compose d’œuvres aux statuts divers : œuvres finies, études, dessin technique… Dans le domaine de l’estampe, la présence de feuilles montrant plusieurs états d’une gravure – et notamment des monotypes rehaussés à la gouache – a permis d’étudier un aspect important de l’œuvre de l’artiste : le rôle de la couleur. 

15e bataillon de chasseurs alpins 12/30. Lorraine vers la Ligne Maginot, 1941, inv. 2019.58.37.

15e bataillon de chasseurs alpins 12/30. Lorraine vers la Ligne Maginot, 1941, inv. 2019.58.37
Photo © Paris - Musée de l'Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël © ADAGP, Paris

« Je passe caporal mitrailleur, chef de pièce, cela ne change rien à la rusticité de mon existence. Les grands ennemis sont l’humidité et le froid : pour s’en défendre, il faut s’enfoncer dans la paille et s’en recouvrir – un mètre et plus après s’être déséquipé – (attention à ne rien égarer) après s’être déchaussé, débarrassé du casque et des molletières, de la capote qui devient couvre-pied, et enveloppé dans sa couverture, le béret enfoncé jusqu’aux yeux, juste le nez sorti en prise d’air. Il est bon de s’entasser à plusieurs, par affinité, on se réchauffe et on se sèche l’un l’autre, le bon nombre est trois, la meilleure place le milieu, à tour de rôle chacun en profite. »

Jean Delpech, Journal de guerre

Un fort écho avec les collections du musée de l’Armée

Les œuvres de Delpech dialoguent avec les objets présents dans les collections du musée de l’Armée. De nombreux dessins techniques sur l’armement et l’équipement militaires trouvent ainsi un écho direct avec les armes, uniformes et objets du quotidien des soldats présents dans les collections du Musée. Par ailleurs, dans ses compositions sur le thème des trophées et tombeaux imaginaires réalisées en 1945, Jean Delpech mêle armement, reproduit avec exactitude, et références religieuses ou mythologiques. Ces œuvres d’une grande originalité font de Jean Delpech un artiste atypique. 

Tombeau imaginaire d’un blindé, 1945, inv. 2019.59.53

Tombeau imaginaire d’un blindé, 1945, inv. 2019.59.53 
Photo © Paris - Musée de l'Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Emilie Cambier © ADAGP, Paris

https://collectionjeandelpech.musee-armee.fr/presentation-collection